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Pétrole : un problème de débit

On se souvient tous des problèmes de robinets sur lesquels nous avons planché à l'école primaire... La crise du pétrole n'est pas loin d'être un problème similaire.

En effet il y a encore quelques années, le discours se voulait rassurant : il y a encore du pétrole pour 100 ans, pas la peine de s'inquiéter, il suffit de payer un peu plus en R&D (recherche & développement) pour aller le chercher plus profond ou moins pur.

104659618.pngMais il y a deux limites désormais bien reconnues à ce raisonnement :

Première limite : l'économie du pétrole se base sur le "débit" = la production annuelle. Si la demande augmente mais pas le débit, il y a problème, et ce indépendamment des réserves : la taille du puit n'est pas la taille du seau pour sortir l'eau du puit. Comme le montre le graphe ci contre, la crise ne commencera donc pas le jour ou la dernière goutte sortira d'un puit (point n°3), mais bien avant. On identifie classiquemet aujourd'hui ce qu'on appelle le "pic de production" (point n°2) i.e. le jour où la production commencera à décroître. Le problème survient un peu avant (point n°1), lorsque la production commence à ne plus satisfaire la croissance du besoin. J'ai situé ce point en 2007 mais les experts ne sont pas tous d'accord sur les dates. A noter que les  réserves extractibles sont représentées par la surface en gris.

Seconde limite : augmenter le débit (augmenter la hauteur du pic de production) et augmenter les réserves de pétrole extractibles (reculer la date de la dernière goutte) n'est pas qu'une question d'investissement dans la prospection : à partir du moment où pour produire une tonne de pétrole il faut physiquement une quantité d'énergie supérieure à une tonne équivalent pétrole (TEP), il n'y a pas vraiment lieu de l'extraire car le bilan énergétique est négatif...

L'écart entre le besoin et la production de pétrole (courbes bleue et verte) doit donc être progressivement comblé par des autres énergies. Il s'agit bien des autres énergies : car contrairement à ce qu'on a voulu nous faire croire, le pétrole n'aura pas un remplaçant, mais une multitudes de remplaçants : économies d'énergies, nucléaire (un certain temps seulement car tout le comme le pétrole l'uranium est en stock limité), soleil, vent, gravité (barrages), géothermie, biomasse... des solutions variées plus ou moins adaptés suivant les régions et les types de besoins. A plus long terme peut-être que la fusion nucléaire offrirait une énergie quasi illimitée, mais rien n'est moins sûr (c'est l'ambition du projet ITER, qui laisse certains scientifiques sceptiques, mais qui a mon sens vaut sans doute le coup d'être tenté tant un résultat positif révolutionnerait le domaine de l'énergie, et à condition que celà n'empêche pas d'investir à plus court terme pour remplacer le pétrole)

Sur le sujet je ne saurais que recommander l'ouvrage "la vie après le pétrole" qui me semble être une bonne synthèse.

Et pour terminer, un petit zoom sur le problème actuel des bio-carburants : alors que (presque) tout le monde préconisait l'usage de bio-éthanol il y a peu, voilà que les écologistes manifestent contre les bio-carburants accusés de tous les maux notamment la hausse des prix du blé, du maïs... C'est un peu vrai et c'est lié à des excès comme au Brésil ou aux Etats-Unis. Mais utilisé comme celà est préconisé par exemple en Europe en exploitant au mieux les terres en friche (sans dépasser quelques % de la production je crois), celà ne génèrerait pas ce type de problème. De grâce, ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain... Il faudrait d'ailleurs aussi appliquer les mêmes règles que pour l'alimentaire en ce qui concerne les pesticides et engrais de façon à garder les terres utilisables pour l'alimentaire si besoin (réversibilité), mais c'est encore un autre sujet...

Commentaires

  • Ah ben voila, je découvre ce post fort intéressant avec retard...
    Juste quelques commentaires sur les "biocarburants" :

    - Les écolos ont toujours été contre, à mon avis avec raison, il n'y a donc pas de revirement de leur part. Les biocarburants ont toujours eu pour principal but de satisfaire les lobbies agricoles.

    - Même si l'Europe n'utilise que quelques % de ses terres pour les biocarburants, et même si c'était des terres en friche, ne vaudrait-il pas mieux les utiliser pour répondre à la demande croissante de nourriture ? Est-il moral de bruler de la bouffe pour essayer de conserver à toute force notre mode de vie ?

    - Ceci d'autant plus que le bénéfice des biocarburants en terme d'émission de CO2 est très faible voire négatif

    En conclusion, développons la recherche pour trouver des biocarburants qui n'entreraient pas en compétition avec les cultures vivrières et en attendant utilisons la terre pour nourrir les hommes.

  • Sur le principe je suis d'accord avec toi.
    Mais en pratique,

    1) les paysans produisent pour ceux qui achètent. Et je pense que pour les pays pauvres, c'est plus simple et moins cher de produire sur place que d'acheter des produits européens.

    2) Il faut minimiser les transports, donc produire du bio carburant avec nos surplus, et arrêter de piller les pays pauvres pour leur permettre de manger leur propre production. En celà l'augmentation du prix du pétrole amène un espoir : celui de réduire les transports de marchandise et donc de favoriser les circuits de distributions courts.

    3) Sauf erreur, le colza par exemple est sauf erreur aussi utilisé pour "reposer" la terre, et c'était le cas bien avant les bio-carburants.

  • Ton raisonnement repose sur les hypothèses que les prix alimentaires sont locaux et que le cout de leur transport est important. Or ces deux hypothèses sont fausses : les prix alimentaires sont mondiaux (on le voit bien à la simultanéité des révoltes de la faim de par le monde) et le cout du transport est marginal (ce qui explique d'ailleurs que les prix soient mondiaux).

    Quant à 'l'espoir" que représente pour les pays pauvres un pétrole cher, il faut hélas constater que cela se traduit chez eux surtout par une inflation qui se surajoute à l'augmentation des prix alimentaires. Sans compter que cela favorise la déforestation (le bois de chauffage remplaçant le pétrole) ainsi que l'exploitation du charbon, encore plus polluant.

    Le rêve d'un monde "relocalisé" grâce à l'augmentation du prix du pétrole est à mon avis le passage de loin le moins rigoureux du livre "La vie après le pétrole".

  • Je ne crois pas : dans mon secteur industriel, et je pense que çà va se propager, on va petit à petit se rendre compte que le prix du transport ne sera pas marginal et que donc produire sur place est plus rentable. Renault ne va pas fabriquer des Laguna en Roumanie ou en Inde, mais des Logan. Et s'il exporte la Logan en France, c'est un volume marginal comparé à ce qui est vendu dans les pays voisins.

    Par ailleurs je crois aussi qu'au delà de la prise en compte du prix du transport, les états vont jouer du protectionnisme pour protéger leurs économies. Et je partage l'avis -un peu provocateur- d'Emmanuel Todd invité de la convention Modem de dimanche dernier à la maison de la chimie : l'Europe doit faire un peu de protectionnisme pour protéger son économie. Il ne s'agit pas de viser l'autarcie, mais éviter la concurrence déloyale de pays aux normes sociales et environnementales moindre. Ce n'est donc pas non, plus une mesure définitive et idéologique, mais une mesure en attendant que ces pays arrivent au même niveau. Elle vise aussi à éviter la faillite de nos économies et à permettre de conserver des savoir faire en Europe. Elle contribuerait aussi à limiter les transports et donc mieux respecter l'environnement.

    Cdt
    D.

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