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235 jours

  • Temps de travail des cadres et délocalisations

    Une loi est en cours de ratification et devrait être ratifiée ce soir : le passage à un temps travail annuel de 235 jours pour les cadres au forfait de jours. La loi vise à instaurer un temps de travail maximum qui supprime tous les RTT et tous les jours férié sauf l'un d'entre eux, le 1er mai par exemple.

    Pourquoi les cadres sont-ils aujourd'hui dans le collimateur de Sarkozy et des  dirigeants d'entreprise ?

    C'est assez simple. Les technologies se complexifient, et donc nécessitent plus d'ingénieurs d'études. Leur coût se voit donc plus dans les comptes de résultats. Et les dirigeants s'intéressent donc de plus en plus à leur optimisation pour améliorer les profits. Ainsi, tout comme le taylorisme et ses dérivés l'ont fait jadis pour les ouvriers, on s'intéresse maintenant à "optimiser", "industrialiser" le travail des cadres : méthodes, processus formalisés, certifications.... leur fonction se mécanise, il deviennent des "ouvriers intellectuels".

    Il y a en outre un double intérêt à formaliser et mécaniser: au delà du gain en productivité, un travail bien cadré et bien formalisé est plus facilement délocalisable. Et pas besoin d'être polytechnicien pour comprendre qu'il est plus facile de délocaliser 1000 ingénieurs qui ne nécessitent chacun qu'un bureau et un ordinateur et produisent des documents informatiques partageables instantanément dans le monde entier, plutôt que de délocaliser une usine dont la construction implique des investissements industriels, des infrastructures routières, des fournisseurs. Ainsi voit-on des entreprises délocaliser les développements informatiques en Inde, une partie de leur ingénierie, et ce beaucoup plus facilement que leurs usines.

    Comment lutter ?

    Pas par du protectionisme. Car si contre la délocalisation des usines on peut imaginer un protectionisme douanier, sur la production de travail intellectuel dématérialisé, c'est impossible. Ainsi les propositions de "protectionisme européens", qui pourraient sauver des emplois ouvriers en France, ne seraient probablement pas efficaces pour sauver des emplois d'ingénierie.

    Faute de vouloir envisager une réduction de salaires comme l'a fait l'Allemagne, on augmente le temps de travail, ce qui certes augmente la productivité apparente, mais détruit des vies de famille, voire des vies tout court (stress, anxiété, dépression). L'augmentation du temps de travail des cadres est surtout non officielle via le concept de "forfait jour". Les cadres qui ne pointent pas atteignent fréquemment les 50 voire 60 heures par semaine.
    Or aujourd'hui, un jeune cadre kinenveut qui fait 50 heures par semaine (10h/jours) pour 30 000€ par an, s'il travaille comme actuellement 218 jours, travail pour un tarif horaire de 12€ (au lieu de plus de 19€ s'il ne travaillait que 35h/semaine).  S'il travaille 10 heures le week-end en plus car il a des objectifs ambitieux à atteindre, le tarif horaire descend à 11 euros. L'écart se resserre avec le SMIC, qui est à 8,71€/heure ! Et de plus, malgré ces efforts qui ruinent des vies personnelles, le coût d'un ingénieur européen restera bien supérieur à celui d'un ingénieur indien. Si ce dernier a les mêmes compétences, ce qui est de plus en plus le cas, rien ne pourra donc empêcher les délocalisations.

    On peut être optimiste et se dire que cette phase sera transitoire, le temps que le monde s'équilibre et les salaires s'homogénéisent : c'est déjà un peu le cas, et en Inde les salaires grimpent vite. Mais si pendant cette phase transitoire nous -français, européens- perdons nos compétences de pointe car nous les délocalisons, nous ne préparons pas un futur facile, c'est un euphémisme : lorsque les salaires seront équilibrés nous serons alors moins compétents et donc moins compétitifs. Une page aura été tournée, celle de la supériorité technologique du monde "occidental".  Il faut en tout cas défendre le maintien d'une industrie en Europe.

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