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mondialisation

  • Bilan social du système capitaliste mondial : mitigé

    Le système économique capitaliste a permis une croissance mondiale continue depuis plus d’un siècle. La crise actuelle semble montrer qu’économiquement et financièrement, il en est arrivé à des dérives dangereuses. Mais prenons un peu de recul sur plus d’un siècle et regardons le bilan social de ce système, avec deux indicateurs : la grande pauvreté, les inégalités. Les résultats sont partagés.

     

     

    La grande pauvreté diminue…

     

     

    Les mesures que l’on trouve sur l’évolution de la grande pauvreté montrent qu’elle recule depuis les années 1980, comme le montre le graphe ci-dessous.

     

    pauvreté.png

     

     

    Entre 1980 et 2000, le nombre d’habitants vivant avec moins de 1$ par jour (en millions) à baissé, passant de 1,4 milliards à 1,2 milliards, grâce notamment au développement de l’Asie. En pourcentage de la population, la réduction est encore plus importante : de 35% elle est passée à 20%. Le modèle économique actuel, en permettant le développement des pays d'Asie notamment, a permis à ce continent de réduire sa grande pauvreté. On ne peut nier cette qualité au système actuel. En celà, il faut se dire aussi que parfois, les délocalisation qui créent du chômage en France ou ailleurs permettent à des Indiens de se développer et de sortir de la grande pauvreté... et que donc tout n'est pas si simple...

     

     

    … Mais les inégalités augmentent toujours

     

    Concernant les inégalités : dans une publication de l’IFRI, on trouve quelques éléments qui tentent de mesurer l’évolution des inégalités dans le monde. On y trouve un graphique, qui si on lui accorde le crédit de l’exactitude, est assez éloquent :

    inégalités.png

     

    On distingue les inégalités internationales (entre les pays) et les inégalités internes (au sein des pays). La courbe montre :

    1. que les inégalités internationales se sont principalement creusées entre 1850 et 1950, et se sont presque stabilisées depuis, même si elles continuent à croître.
    2. que les inégalités internes, qui avaient décru depuis 1900, ont recommencé à croître légèrement depuis 1970.

    yacht.pngAu global, les inégalités n’ont cessé de croître dans le Monde depuis 1820 en tout cas, même si elles se sont stabilisées dans la première moitié du 20è avant de repartir à la hausse à partir de 1950. Ce que le graphe ne montre pas, c’est le détail par continent ; en fait les inégalités internes ont diminué en Asie, n’ont pas diminué en Amérique latine ni en Afrique, mais ont augmenté en Europe. Ce qui explique sans doute le malaise : on voit plus les inégalités par rapport à son voisin que par rapport à son homologue du bout du monde.

     

     

    La mondialisation, la libéralisation des échanges n’a donc pas réussi jusqu’à présent à réduire de faon significative les inégalités. Si le taux de très pauvres diminue, l’écart se creuse malgré tout entre pays pauvres et riches, et depuis 1950 il se creuse aussi entre pauvres et riches d’un même pays. Le modèle économique actuel ne peut donc pas constituer un modèle social et humaniste, sauf à croire qu'il s'agit d'une étape difficile et transitoire, celle de la mondialisationLa crise actuelle, sans doute due à des dérives initiées dans les années 1980, ne fait que le confirmer.

     

    Sans prôner la révolution, il semble évident que des ajustements, et notamment un peu plus de régulation par les Etats, semble plus qu'indispensable. La crise actuelle est une opportunité : il faut que les moyens injectés par les Etats servent aussi à revoir les règles qui régissent le système, pour qu'il ne reparte plus "comme avant".

     

     

    source : publication de l'IFRI

  • Le client est roi, mais le sait-il ?

    Ma précédente note sur la grève à l’usine Renault en Roumanie, m’amène à me poser quelques questions sur les relations avec les pays émergents, les délocalisations... Je suis partagé sur le sujet :

    • à court terme les délocalisations et la compétition des pays comme la Chine font du mal à notre économie
    • mais d'un autre côté, celà contribue à développer ces pays et donc à réduire l'écart de compétitivité, qui devrait finir par s'annuler à moyen-long terme : un certain équilibre de compétitivité devrait être atteint, au sens où les coûts de main d'oeuvre vont s'homogénéiser entre les pays : les délocalisations auront alors moins d’intérêt ou seront plus marginales, d'autant que les coûts de transport augmentent avec le prix du pétrole.

    Il s’agit donc de gérer une phase transitoire. Elle risque d’être longue, car si on voit que l'Asie se développe rapidement (Inde, Chine...) rattraper le niveau du G8 leur prendra un certain temps, et surtout, il restera encore l'Afrique...

    Quelle est donc la stratégie la plus pertinente pour la gérer, sans sacrifier des générations ?

    Les deux stratégies vis à vis des pays émergents

    Je vois bien deux stratégies vis-à-vis des pays à faible coût de main d’œuvre :

    A. Réduction des coûts par délocalisation

    Il s'agit de déplacer une usine qui produit pour le monde entier vers un pays "low cost". Exemple : HP Grenoble délocalisé en Inde.

    • Economiquement : celà peut être rentable, si l'augmentation des coûts de transports n'annule pas la baisse des coûts de production
    • Ecologiquement : impact négatif car les transports augmentent
    • Socialement : celà contribue au développement économique de pays "pauvre", mais au détriment du pays d'origine ou celà crée du chômage à court terme et la perte d'un savoir faire et d'un outil de production qui pourrait lui être utile une fois l'équilibre des compétitivités atteint.

    B. Extension dans les pays à bas coût

    Il s'agit d'une croissance à l'étranger pour fournir les marchés des pays émergent, croissance rentabilisée au maximum en produisant dans les pays émergents, à prix minimal. Exemple : Logan en Roumanie, vendue surtout en Roumanie et dans les pays voisins.

    • Economiquement : çà n'est viable que si l'option A ne l'est pas : sinon l'entreprise est moins compétitive que ces concurrents sur les marchés des pays développés
    • Ecologiquement : c'est la solution la plus écologique car la production est au plus près des marchés clients : les transports sont minimisés
    • Socialement : celà contribue à développer le pays émergent, mais pas au détriment du pays développé qui ne perd pas son savoir-faire.

    Cette stratégie peut être une étape avant la délocalisation totale du type précédent (on ouvre une usine en Inde sans fermer la france, et une fois qu'on est sûr que l'usine indienne marche bien et a atteint le bon niveau, on ferme l'usine en France)

    Mais peut-on blâmer les entreprises qui délocalisent ?

    Si elle respecte un minimum d'éthique comme le fait de ne pas faire travailler des enfants, y compris via des fournisseurs de rang N, on ne peut pas blâmer une entreprise qui délocalise  : l’entreprise décide en fonction d'un faisceau de contraintes liées à des acteurs, dont les pouvoirs respectifs ont évolué et continuent d’évoluer avec la mondialisation :

    • Ceux dont le pouvoir augmente :
      • l'actionnaire : grâce à une plus grande fluidité du marché boursier et de l’information, rendue possible par les technologies, il peut instantanément vendre et acheter et donc tuer une entreprise en la rendant OPAble par ses concurrents par exemple,
      • le client : grâce à la mondialisation et au développement des transports de marchandises, la compétition est accrue et le client est donc plus courtisé
    • Ceux dont le pouvoir baisse :
      • Les Etats : ils sont mis en concurrence (qualité des infrastructures, taux d'imposition, règlementations...) par des entreprises mondialisées
      • Les salariés : ils sont mis en concurrence dans contexte de chômage élevé, -même si avec la papy-boom la tendance risque de s'inverser-, et subissent de plein fouet le pouvoir grandissant de l’actionnaire et du client qui génèrent plus de contraintes : exigence de profitabilité supérieure, flexibilité aux évolutions des besoins...
      • Les petits fournisseurs, qui dépendent des contrats avec des multinationales

    Les entreprises aujourd’hui sont donc contraintes à satisfaire d’abord les actionnaires et les clients, plutôt que les salariés. A ce sujet, je recommande l’excellent ouvrage « la fatigue des élites, la capitalisme et ses cadres » de Henry Dupuis.

    Pour influer sur les entreprises, il faut jouer sur le faisceau de contraintes que l'entreprise doit prendre en compte. Or aujourd'hui ce sont les actionnaires et les clients qui ont le pouvoir sur les entreprises...

    Quelles sont donc les solutions ?

    L'une des solutions, souvent mise en oeuvre, est évidemment d'user du pouvoir des Etats, au niveau national ou CEE, en exigeant sur les produits importés le respect de règles toujours plus contraignantes : c'est une sorte de protectionnisme qui permet de réduire les écarts entre les pays et garantir une certaine sécurité au consommateur. Par exemple, les voitures chinoises n'ont pas été homologuées du premier coup car elles ne respectaient pas le minimum sécurité exigé.

    Il y a à mon sens deux autres pistes à explorer pour faire changer les rapports de force et donner du pouvoir au salarié dans le faisceau des contraintes qui influent sur l'entreprise :

    1. Le salarié est aussi client : faire en sorte par l’éducation et la diffusion d’informations, le renforcement des associations de consommateurs, que le salarié-consommateur use de son pouvoir grandissant pour imposer ses règles et soit cohérent : un salarié-consommateur ne peut pas à la fois se réjouir des prix bas des produits importés en tant que consommateur, et de l’autre se plaindre des délocalisations en tant que salarié,
    2. Le salarié peut devenir actionnaire : promouvoir l'actionnariat salarial, voire les sociétés en commandite par action, cette structure permettant par exemple de déléguer le pouvoir aux seuls actionnaires salariés si ce sont eux les commandités (ex : société Steria)

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    "L'économie j'y comprend pas grand chose,
    mais je me dis que je suis pas le seul :
    si au moins un modèle marchait, çà ce saurait" WeirdMan